Renault 8 Gordini : 50 ans au Monte Carlo historique
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Renault 8 Gordini : 50 ans au Monte Carlo historique

A l’occasion du 50ème anniversaire de la célèbre Renault 8 Gordini et sa couleur bleue à bandes blanches, le Team Renault Classic engage cinq exemplaires sur le Rallye Monte-Carlo Historique. Les cinq équipages prendront la route de la Côte d’Azur dès le 24 janvier au départ de Reims avec une arrivée prévue dans la nuit du 28 au 29 janvier à Monaco. On retrouve les fidèles Jean Ragnotti, Alain Serpaggi, Michel Leclère mais aussi Thierry Chancel, ainsi que le lyonnais Gilles Zaffini que nous supportons avec enthousiasme !

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo

Un retour au source pour les équipages du Renault Team Classic

Jean Ragnotti retrouve sa première voiture de course (“Rallye du Vaucluse” 1967). Il est co-piloté par Michel Duvernay, vainqueur en 1981 de la Coupe de France Renault Cross Elf et de la Coupe Renault 5 GT Turbo, ils porterons le N°8. Alain Serpaggi, emblématique pilote-essayeur d’Alpine est accompagné par Jean-Pierre Prevost, N°12. Michel Leclère, vainqueur du “Premier Pas Dunlop Coupe Gordini” en 1969 et le journaliste Vincent Roussel piloterons la N°17. Thierry Chancel et François Forgeoux, sont des habitués de l’épreuve ainsi que leur monture, une assez rare 1100 cm3, N°19. Enfin, Gilles Zaffini, agent Renault à Bron, passionné de sport auto et Serge Mollar, piloteront la N°19. A Noter qu’un équipage norvégien, Torgje Kleppe / Henning Jorstad sur R 1135 (N° 39) rappellera la performance de leurs ainés Unnerud / Karlan qui avaient engagé une Renault 8 Gordini 1300 à titre privé en 1968 en terminant 42ème mais premier équipage norvégien.

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
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La “Gorde”, une légende

La simple évocation de “Renault 8 Gordini” ouvre instantanément la mémoire de tout un chacun. Immédiatement le vrombissement du moteur de “la petite bleue à bandes blanches” envahit la boite à souvenirs… Pas un français qui n’ait eu un cousin, un voisin, un ami qui n’ait possédé une Gordini avec laquelle il faisait des courses. Quelle auto et quelle époque ! Elle marchait bien… la “Gorde” et permettait de relier Paris à Marseille plus vite que le train Mistral.
Autant d’affirmations, autant de souvenirs, autant de nostalgie autour de la Renault 8 Gordini ! Aujourd’hui encore, elle est légendaire et son prix, en collection, est très élevé, eu égard à sa conception et à sa diffusion. Assurément, la Renault 8 Gordini fait partie de l’histoire automobile française. Elle a surtout été le révélateur de toute une génération de pilotes qui ont marqué par la suite, le sport automobile français.

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo

Le “Sorcier” Amédée Gordini

Amédée Gordini est né le 23 juin 1899 à Bazzano, en Italie du Nord, non loin de Bologne. Passionné de mécanique et amoureux de la vie, il laisse là sa toute jeune épouse et s’en va à Paris “pour voir combattre le boxeur Georges Carpentier” dit-il à ses amis. Arrivé dans la capitale française, il brûle rapidement ses maigres économies et pour survivre, travaille chez Cattanéo à Suresnes. Dans ce petit atelier, il se penche sur les moteurs Fiat puis Simca sur lesquels il développe quelques idées personnelles pour les rendre plus compétitifs. La course va colporter rapidement son nom après les succès obtenus aux “24 Heures du Mans” ou lors du “Bol d’Or” notamment.
Après la seconde guerre mondiale, Henri-Théodore Pigozzi, lui aussi d’origine italienne, lui propose d’associer son nom à la marque automobile française qu’il vient de créer : Simca. De 1946 à 1951, les Simca Gordini, frêles et fines, vont s’aligner au départ de toutes les épreuves européennes face aux Ferrari, Maserati, Alfa Roméo ou Talbot beaucoup plus puissantes. Lâché par son commanditaire, Amédée Gordini va pourtant faire survivre son écurie jusqu’en 1956 en engageant à tours de bras et à tours de force, des F1, des F2, des “barquettes sport” et des “coupés” dans toutes les épreuves du calendrier sportif international. Pour conduire ses autos “bleues”, il engage une pléiade d’excellents pilotes français : Maurice Trintignant, Robert Manzon, André Simon, Jean Behra, Jacky Pollet mais aussi des pilotes étrangers tels que le prodige argentin, Juan-Manuel Fangio, Bira, le prince du Siam, le brésilien Nano Da Silva Ramos ou les belges André Pilette ou Paul Frère.
Malgré quelques subsides privées et l’enthousiasme de quelques supporters, fin 1956, l’atelier du 69 boulevard Victor à Paris, Porte de Versailles — où les Gordini étaient conçues et construites — ferme définitivement ses portes.

Amédée Gordini
Amédée Gordini

La Renault 8

Pierre Dreyfus succède à Pierre Lefaucheux ; qui s’est accidentellement tué sur la route; en février 1955 à la Direction de la Régie Renault. Fernand Picard, Directeur du Bureau d’Etudes de la Régie et père de la 4 CV et François Landon, ex-pilote et responsable du Service Compétition de la marque au losange, en profitent pour proposer à leur nouveau patron dès 1956, de collaborer avec Amédée Gordini. Le 1er janvier 1957, celui-ci entame donc ses travaux pour dynamiser la Renault Dauphine : cette Dauphine Gordini aura bientôt une boîte quatre vitesses et gagnera une petite dizaine de chevaux. Elle sera la première de la longue et glorieuse lignée des Renault Gordini.
Pierre Dreyfus (Docteur en Droit et non ingénieur comme ses collaborateurs) regarde l’automobile plus en sociologue qu’en technicien et pose une vision mondiale du marché. Il est convaincu qu’un constructeur de la taille de Renault n’a d’avenir que s’il exporte plus de la moitié de sa production. Dreyfus lance donc le “Projet 113” dont le cahier des charges peut se résumer ainsi : mécanique avec culasse en alliage, freins à disques sur les quatre roues, grand confort intérieur pour quatre adultes et style moderne. Pour répondre à ces dernières exigences, les stylistes Renault, Robert Barthaud et Gaston Juchet vont travailler en collaboration avec un designer indépendant, Philippe Charbonneaux, formé à l’école américaine. Le Renault 8 est née et l’auto est lancée en juin 1962 mais sa grande présentation publique a lieu au sein de l’incontournable “Salon de l’Auto” de Paris en octobre. La voiture séduit immédiatement les français et avec sa variante Renault 10 elle sera produite jusqu’en 1976 (!) à un total de 1.316.134 unités.

Renault 8
Renault 8

Elle est originellement équipée d’un moteur quatre cylindres de 956 cm3, le “Sierra”. Son succès va encore s’accélérer avec la version “Major” à moteur 1108 cm3 (type R 1132), appréciée de tous les essayeurs de la presse automobile et José Rosinski (pour le magazine spécialisé Sport Auto) la trouve “séduisante”. Hubert Melot, ingénieur à la Régie, en prépare une “version spéciale” qu’il mène à la 7ème place lors du «Tour de Corse» 1963. Il est temps d’aller encore plus loin.
En effet, il est rapidement évident que la Renault 8 est une bonne base de développement et qu’avec un peu d’astuces, on peut la rendre performante. Les idées d’ailleurs ne sont pas ce qui manque chez les spécialistes. Ainsi, Henri Fretet, ex-mécanicien chez Delage et responsable des modèles spéciaux chez Renault, développe une mécanique plus affutée bien qu’utilisant essentiellement des pièces de série. En parallèle, François Landon, le responsable du Service Compétition fait abaisser le toit de la petite berline et quand les deux idées se rejoignent sur un modèle test, l’auto atteint les 170 km/h !
De son côté, Amédée Gordini travaille aussi mais essentiellement sur le moteur. Bien qu’on lui ait demandé de ne retenir que des pièces de série pour rester, lui aussi, dans le cadre d’un budget serré, le “Sorcier” décide de passer outre et opte pour des solutions plus “typées course” en travaillant sur une culasse dite “hémisphérique” en référence à la forme des chambres de combustion. Évidemment, cette innovation rend “sa version” Renault 8 plus rapide que celle de l’équipe Landon-Fretet et contre toute attente, c’est elle qui est retenue, partant du principe que “le prix s’oublie et la qualité reste” !

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo

Baptême de course pour la Renault 8 Gordini

Les quatre amortisseurs arrière et l’assistance au freinage type Hydrovac ; déjà testés sur les Renault 8 d’usine lors du Marathon de la route, Liège – Sofia – Liège en 1963 ; venant donner de l’assise à l’auto, il est décidé de lancer “une berline sportive pour moins de 12 000 Francs” (contre 17 000 Francs pour une Alfa Guilia Ti). Histoire de bien différencier le bolide des autres berlines, il est choisi de ne la proposer qu’en bleu, la fameuse référence 418, et de lui adjoindre des bandes initialement prévues à damiers et finalement retenues blanches. La Renault 8 Gordini voit donc le jour en 1964. Et pour bien l’affirmer, Jean Vinatier, pilote officiel Renault remporte avec elle le “Tour de Corse” 1964 devant l’expérimenté Jean Rolland et sa performante Alfa Roméo Tubolare 1600.
Fort de ce succès, c’est en toute confiance que les Renault 8 Gordini s’alignent au prestigieux Rallye Monte-Carlo en janvier 1965. Hélas, ce sera l’échec, très vite oublié après les victoires au classement général de Jean Vinatier au “Rallye Lyon Charbonnières” et de Pierre Orsini au “Tour de Corse”. Pour 1966, Jacques Féret confie une auto bleue à un pilote suédois Bengt Jansson en complément de Jean Vinatier, incontournable pilote français. Malgré ce choix judicieux, ce ne sera guère mieux au Monte-Carlo mais, par contre, lors des “24 Heures de Spa FrancorchampsVinatier/Bianchi, Piot/Andruet et Orsini/Vacca enlèvent la très médiatique “Coupe du Roi” avec leurs trois Renault 8 Gordini quasi de série.
Quelques semaines plus tard, le parisien, Jean-François Piot, après avoir terminé brillamment quatrième lors de la redoutable “Coupe des Alpes“, enlève à son tour le “Tour de Corse” signant donc la troisième victoire consécutive de la Renault 8 Gordini sur les terres corses. Notons encore que Mauro Bianchi gagne le “Grand Prix de Macao“, course disputée dans cette lointaine colonie portugaise enclavée en Chine. La Renault 8 Gordini est désormais l’arme redoutée, d’autant plus que depuis mars 1966, la Régie Renault en propose une nouvelle version.

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo

R 1135 : La R8 Gordini 1300

Sous la nomenclature officielle de R 1135, elle dispose désormais d’un moteur de 1255 cm3 qui développe 88 ch Din, offre un couple de 11,9 mkg et permet à la “belle bleue” d’atteindre les 175 km/h en vitesse de pointe. L’amateur appréciera également désormais la boîte de vitesses (type 330-6) qui lui met à disposition cinq rapports permettant ainsi à la nouvelle Renault 8 Gordini 1300 d’atteindre 400 mètres départ arrêté en seulement 16.9 sec et 32 sec et de franchir la borne du kilomètre. Les deux carburateurs double corps Weber 40 DCOE sont également “un plus” apprécié des connaisseurs.
Comme l’était la Renault 8 Gordini 1100 (R 1134), la nouvelle Renault 8 Gordini 1300 (R 1135) est proposée uniquement en “Bleu France” lors de son lancement en 1967 mais bien vite elle sera aussi proposée en blanc, rouge et jaune en 1969 et même en “gris sauge” ou en “vert foncé” très British Racing Green en 1970. Toutes seront dotées de la fameuse calandre “4 phares”, du double réservoir d’essence (38 litres à l’arrière et 26 litres à l’avant) et du célèbre volant “Quillery” en mousse.

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo

Coupe Gordini, pépinière de talents

Vendue 13 500 Francs en 1967, cette Renault 8 Gordini va faire rêver toute la génération des Baby-Boomers. Pour la première fois, une voiture de série, produite par un constructeur généraliste, va leur permettre de “courir en auto”. Désormais faire des courses automobiles n’est plus l’apanage de quelques amateurs fortunés. Chaque jeune peut désormais espérer acquérir une auto sportive. La signature Gordini sur le cache-culbuteur du moteur 812-00 et le logo fixé sur la jupe arrière revêt beaucoup de significations pour les jeunes amateurs et aspirant pilote.
Un homme va vitre comprendre l’intérêt porté à cette auto louangée unanimement par la presse : Georges Fraichard, ancien Rédacteur en Chef du Magazine “Moteurs” et ami de Behra et Gordini. Il évoque l’idée de lancer une “Coupe” réservée à cette voiture et en parle avec Alain Bertaut et Pierre Allanet de “l’Action Automobile”. Ceux-ci obtiennent l’assentiment de Robert Sicot, attaché aux Relations Extérieures de Renault. Il leur faut toutefois convaincre les organisateurs de courses qui craignent une désaffection du public face à « des pilotes néophytes au volant d’autos du commerce ».
Les premières courses lèvent vite les réticences et le public se passionne pour les “bagarres” et autres “bourres” entre ces jeunes qui ne doutent de rien ! Dès son lancement, en 1966, certains d’entre eux se font remarquer au sein de cette “Coupe Renault 8 Gordini” : Jean-Luc Thérier, Alain Cudini, Jean-Pierre Jarier, Robert Mieusset, Jean-Claude Andruet, Jean-Pierre Jabouille, Michel Leclère feront de belles carrières sportives alors que Michel Hommell y trouvera la vocation de Patron de Presse et Hugues de Chaunac celle de Directeur d’Ecurie.

Renault 8 Gordini
Renault 8 Gordini

Voiture de course

La légende de la Renault 8 Gordini s’appuie donc sur un indissociable triptyque : l’auto de série, la coupe et le rallye. Avec ce petit bolide bleu à bandes blanches, chacun est “Champion du Monde de sa rue”. En 1968, Jean-Pierre Nicolas remporte le Rallye du Maroc et en janvier 1969, Jean-Luc Thérier signe un autre authentique exploit : la victoire en Groupe 1 (Tourisme de série) doublée d’une extraordinaire cinquième place au classement général lors du Rallye Monte-Carlo. Ce sera le point d’orgue de cette Renault 8 Gordini, désormais icône du sport automobile français. La même année, le belge Jean-Marie Jacquemin termine septième de l’exigeante “Coupe des Alpes” (1° en groupe 1) et en 1970, Jannick Auxemer y remporte le Critérium français des Circuits en Tourisme de série.

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo

Alors que la Renault 12 Gordini lui succède officiellement le 19 juillet 1970, lors d’une inoubliable fête baptisée “Jour G” sur le circuit du Castellet, la Renault 8 Gordini continue sa moisson de succès, le plus souvent “améliorée” par des spécialistes (en Groupe 2) ou “bidouillée” par des amateurs (en Groupe 5). On la retrouve ainsi au pied des courses de côte, sur le parking d’hypermarchés pour un slalom ou au départ d’une spéciale de rallye où elle continue à faire vibrer les foules. « Avec elle, y a du monde » comme l’affirme Publicis pour Renault. Ou, plus explicite encore : « A son volant, t’es comme une mariée… » (!).
De 1964 à 1970, plus de dix mille “Gorde” (2626 type R 1134 et 8981 type R 1135) ont été fabriquées dans l’usine voulue par Pierre Lefaucheux, à Flins, en bord de Seine. Cinquante ans plus tard, elle est toujours vénérée et bichonnée par les amateurs qui en ont fait un modèle de collection incontournable.

Renault 8 Gordini Rallye Monte Carlo
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Source CP Renault

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Pierre Henri Brautot (@PH_Brautot)

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