Cinquante ans après ses débuts au Salon de Paris de 1975, la société britannique Encor présente la « Series 1 », une renaissance spectaculaire de la légendaire Lotus Esprit. Mais il ne s’agit pas d’une simple restauration. Derrière cette carrosserie familière se cache une réinterprétation profonde, dont les secrets de fabrication sont aussi surprenants que son design est emblématique.
Peu de voitures ont capturé l’imaginaire collectif comme la Lotus Esprit. Avec sa silhouette en coin, pure et radicale, dessinée par le maître Giorgetto Giugiaro, elle est devenue une icône instantanée, un statut immortalisé par son rôle de sous-marin aux mains de James Bond dans « L’Espion qui m’aimait ».


Ce n’est pas une S1 d’époque, mais une Lotus bien plus moderne
Le point de départ n’est pas une Esprit S1, mais une Esprit V8 des années 90. Le choix d’Encor peut sembler surprenant. Pour recréer la pureté de la S1 de 1975, l’équipe n’utilise pas un modèle de cette époque, mais une Lotus Esprit V8 produite entre 1996 et 2004 comme voiture donneuse.

Cette décision est purement pragmatique : le châssis de la V8 est bien plus évolué, plus rigide et offre une base technique supérieure. De plus, partir d’un modèle plus récent facilite grandement les processus d’immatriculation et l’entretien futur.

La silhouette emblématique de l’Esprit S1 est ensuite recréée grâce à une coque monobloc entièrement en fibre de carbone, qui remplace la fibre de verre d’origine. Cette approche combine le meilleur des deux mondes : le look intemporel de l’Esprit S1 avec la rigueur structurelle et la légèreté d’une supercar moderne, la nouvelle coque pesant environ la moitié du poids de l’originale tout en étant beaucoup plus rigide.

Une philosophie de « remasterisation » respectueuse
La philosophie d’améliorer respectueusement sans dénaturer. L’équipe d’Encor – composée d’anciens de Lotus, Aston Martin, Koenigsegg et Skyships Automotive – s’est imposée cette ligne directrice. Leur concept central est celui de « l’amélioration respectueuse » (respectful enhancement). La Lotus Esprit est considérée comme un élément du patrimoine culturel britannique, un objet à préserver et à élever, pas à réinventer.

Pour ce faire, les designers ont commencé par scanner numériquement une voiture originale afin d’affiner sa géométrie avec une précision moderne. Ce processus a permis d’obtenir des lignes plus nettes et des surfaces plus tendues, et surtout de supprimer la ligne de moulage qui parcourait la carrosserie en fibre de verre des années 70, offrant une pureté visuelle que Giugiaro n’aurait pu qu’imaginer.

« La S1 Esprit était avant-gardiste, pure et sans aucun compromis. Toucher une forme comme celle-ci est une énorme responsabilité. Chaque ligne que nous avons affinée, chaque décision que nous avons prise, vise à honorer l’intention d’origine tout en permettant à la voiture de performer, de procurer les sensations et de fonctionner comme sa silhouette l’a toujours promis. » précise Daniel Durrant, responsable de la conception chez Encor.

L’âme analogique à l’ère du numérique
Une expérience de conduite analogique avec une technologie discrète, voici l’un des secrets de ce projet « restomod ». Malgré sa reconstruction complète avec des technologies de pointe, la Series 1 est décrite comme étant analogique dans l’âme. Encor a fait des choix d’ingénierie délibérés pour préserver une expérience de conduite pure et non filtrée.

La direction reste assistée hydrauliquement, et non électriquement, pour conserver le retour d’information tactile spécifique à Lotus, le fameux « toucher de route » cher aux Lotussiens. De même, la voiture est exclusivement équipée d’une boîte de vitesses manuelle renforcée, refusant toute concession à l’automatisation.

Cette approche est contrastée par l’intégration de technologies modernes, mais toujours discrètes. Le tableau de bord numérique flottant, usiné dans un seul bloc d’aluminium, est une pièce d’art, tandis que les systèmes d’infodivertissement et de climatisation, conçus par Skyships, sont pensés pour améliorer l’expérience de conduite, et non la dominer.
Une ingénierie obsessionnelle pour corriger les faiblesses du passé
Les points faibles historiques de la Série 1 ont été entièrement corrigés. Encor a méticuleusement ciblé et renforcé les faiblesses notoires de la Lotus Esprit originale. La plus célèbre d’entre elles, la transmission manuelle à cinq vitesses — le maillon faible, célèbre pour sa fragilité — a été entièrement repensée en collaboration avec le spécialiste Quaife. Elle reçoit désormais un arbre d’entrée plus robuste, un embrayage bi-disque sur mesure et un différentiel à glissement limité pour gérer la nouvelle puissance sans crainte.

Le moteur V8 biturbo de 3,5 litres est entièrement reconstruit avec des pistons forgés, des injecteurs améliorés, des turbocompresseurs reconditionnés et un nouveau corps de papillon électronique, portant sa puissance à 406 ch et 478 Nm de couple.

Le freinage est confié à des composants AP Racing et les suspensions sont mises à niveau selon les spécifications de la très respectée Sport 350. Le résultat est une voiture qui atteint enfin le niveau de performance que sa silhouette agressive a toujours suggéré.
Un prix exorbitant… et une condition d’achat unique
Le prix est stupéfiant et il ne comprend même pas la voiture de base ! L’exclusivité a un prix, et celui de l’Encor Series 1 est stratosphérique. Le tarif de départ est fixé à 430 000 £, soit environ 500 000 €. Cependant, le détail le plus surprenant est ce que ce prix n’inclut pas les taxes. Il faut encore y ajouter les taxes et les options, mais surtout, il ne comprend pas la voiture donneuse.
En effet, chaque client doit fournir sa propre Lotus Esprit V8 pour que la transformation puisse commencer. Le coût total, en incluant la voiture donneuse et les taxes, est estimé bien au-delà de 600 000 €, positionnant l’Encor Series 1 parmi les restomods les plus exclusifs au monde. La production est strictement limitée à 50 exemplaires, ce qui garantit à la Series 1 un statut immédiat d’objet de collection.
L’hommage ultime ?
Bien plus qu’un simple restomod, l’Encor Series 1 est un monument du design des années 70, méticuleusement réimaginé pour concrétiser la promesse de performance que son esthétique légendaire a toujours suggérée. C’est la concrétisation d’une supercar dont les performances sont enfin à la hauteur de son esthétique. Mais une question demeure : l’Encor Series 1 est-elle l’expression ultime de la préservation automobile, ou une icône perd-elle son âme en étant perfectionnée au-delà de son époque ? Les 50 futurs propriétaires auront la réponse.
| Caractéristique | Lotus Esprit Originale (S1 / V8) | Encor Series 1 (Amélioration) |
| Carrosserie | Coque en fibre de verre en deux parties | Coque monobloc en fibre de carbone autoclavée |
| Châssis | Châssis d’origine | Châssis Esprit V8 démonté, sablé et restauré avec cage de sécurité en carbone intégrée |
| Moteur | V8 3,5L biturbo de série (S4) | V8 3,5L biturbo entièrement reconstruit (pistons forgés, turbos reconditionnés, gestion moderne) |
| Puissance | (Standard de l’époque) | ~400 ch / 475-478 Nm de couple |
| Poids | (Variable selon le modèle) | Cible inférieure à 1 200 kg |
| Performances | (Standard de l’époque) | 0-100 km/h en ~4s ; Vmax ~280-282 km/h |
| Transmission | Manuelle 5 vitesses (réputée fragile) | Manuelle 5 vitesses renforcée par Quaife (arbre, différentiel, embrayage bi-disque) |
| Suspension/Freinage | Standard de l’époque | Spécifications Sport 350 et freins AP Racing |
| Direction | Assistée hydrauliquement | Assistée hydrauliquement (préservée) |
| Habitacle | Plastiques et matériaux des années 70 | Aluminium usiné, fibre de carbone, écrans numériques intégrés |
Source CP et crédit photos @Encor Design et @Lotus






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