Cela fait maintenant 3 ans quasiment qu’Audi nous a présenté son concept-car d’e-tron GT (lire ici), berline sportive 100% électrique. La voici enfin sur nos routes presque sans changement vis-à-vis du concept-car. De quoi nous donnez envie d’aller la voir en vrai. Direction la magnifique région du Lubéron pour voir ce que cette sportive du futur nous apporte.
Un style à faire tomber
Je ne vais pas y aller par quatre chemins, j’avais déjà succombé à la beauté de cette auto lors de ma découverte à Genève en 2018 (lire ici). Une berline coupé avec un profil à couper le souffle qui donnait déjà l’impression d’être rapide à l’arrêt !
Et aujourd’hui, maintenant que je suis devant, le charme opère toujours. Les proportions sont splendides, 4m99 de long, presque 2m de large pour 1m41 de haut (-2cm par rapport à une A7). En fait, on a l’impression de voir une Audi A7 à l’agressivité exacerbée. La ligne de toit fuyante et basse, les ailes arrières très larges et marquées posent véritablement la voiture sur la route.
Sur la face avant, on note un nouveau langage stylistique, puisque la calandre est désormais couleur carrosserie avec un contour contrasté en gris ou noir selon les versions. On peut bien entendu avoir la calandre entièrement noire ou grise en option. Personnellement, j’aime bien en couleur carrosserie et cela renouvelle un peu l’avant de cette Audi tout en gardant les codes bien connus de la marque avec la calandre single frame.
A l’arrière, on observe surtout les ailes larges, c’est franchement impressionnant, surtout associé aux pneus de 305mm de large qui équipent notre exemplaire d’essai. On retrouve ensuite un aileron rétractable astucieusement camouflé dans le prolongement de la lunette arrière. En descendant le regard, on arrive ensuite sur la bande de feux arrière full led qui nous joue une jolie animation à l’ouverture et fermeture de la voiture (inutile donc indispensable !).
Je mets un petit bémol à l’épaisseur des extrémités qui alourdit un peu le dessin global de l’arrière à mes yeux. Enfin on arrive sur un très gros diffuseur, en carbone optionnel sur notre exemplaire RS e-tron GT, qui n’est pas là pour la figuration comme on a pu l’observer après une averse en suivant nos camarades.
Tout n’est qu’aéro
Difficile de parler du style extérieur sans aborder le sujet de l’aérodynamisme, élément fondamental sur un véhicule électrique. L’autonomie des véhicules étant un enjeu majeur, l’aérodynamisme de ce type de véhicules est toujours très important. Cette Audi e-tron GT ne déroge pas à la règle et affiche un Cx de 0,24 !
Pour obtenir ce résultat, le travail est énorme. Sur la face avant, on note des prises d’air qui s’ouvre et se ferme selon les besoins et des évents de chaque coté du pare-chocs qui viennent guider le flux sur la roue. Roues qui possèdent elles-mêmes un dessin plutôt plein pour faire glisser au maximum l’air (sans pour autant empêcher la ventilation des freins). Ce flux continue ensuite avec la sortie d’air de l’aile avant puis le long des portes joliment creusée pour enfin terminer sur l’aile arrière.
A tout ceci est associé un fond plat complet afin que le flux fonctionne parfaitement avec le diffuseur arrière.
Certains se demanderont sans doute pourquoi ne pas y avoir associé les caméras déjà aperçues sur le reste de la gamme e-tron. Et bien c’est surtout pour une question de style à priori. Pour ce genre de berline, la clientèle apprécie avoir des rétroviseurs classiques.
Ouvrons la porte
A l’intérieur, autant le dire tout de suite, les personnes habituées aux Audi ne seront pas dépaysés. Et c’est une volonté de la marque. Les clients habitués doivent retrouver facilement leurs marques dans chaque modèle de la gamme.
Nous voilà donc face au virtual cockpit qu’on connait associé à un affichage tête haute. L’ensemble est toujours aussi lisible et fluide, un vrai plaisir à utiliser. On note aussi la magnifique bande carbone mat qui parcourt l’habitacle de porte à porte. Au centre de la planche de bord trône un bel écran tactile fonctionnel. A noter que juste en dessous on retrouve les commandes de la climatisation et quelques raccourcis avec des boutons physiques ! Merci Audi. Parce que le tout tactile à ses limites, et c’est vraiment agaçant d’aller chercher dans un menu en quittant la route des yeux, un simple réglage de ventilation. Je sais que certains préfèrent le tout tactile comme dans un Q8 par exemple, mais ce n’est pas mon cas.
Venons en ensuite au beaux sièges baquets. Proposés en plusieurs finitions, du tissu recyclé au tout cuir, ils procurent un maintien très correct bien qu’un peu large pour mon petit gabarit d’1m70. Mais ça c’est plus un défaut du bonhomme du coup.
A l’arrière, le style impose forcément un pavillon un peu bas, mais l’espace aux jambes est tout à fait convenable pour voyager à 2 adultes à l’arrière (celui du milieu sera un peu puni, à réserver aux courts trajets donc). Niveau rétrovision idem, on n’y voit pas grand chose, mais la caméra 360 est là en cas de besoin.
Bon à savoir, l’e-tron GT est équipé en série d’un toit en verre fumé qui apporte une jolie luminosité à l’habitacle. Sur l’exemplaire RS de notre test, nous avions l’option toit carbone (-12 kg et +4600 euros) qui assombrit nettement l’ambiance à bord.
Power On
Les présentations étant faites, il est temps de partir découvrir le Lubéron, ses champs de lavande et ses villages pittoresques. Pression sur le bouton de démarrage, le V8 s’ébroue dans un grondement intimidant avant de se caler sur un ralenti instable et crépitant.
Ah non mince, ça c’est dans ma tête.
Pression sur le bouton, et rien. On bascule le bouton de la boite de vitesse sur D et la GT avance délicatement avec un son extérieur singeant un V8 thermique et une soucoupe volante. Déroutant, mais pas désagréable non plus.
Quelques manœuvres pour sortir du Domaine des Andéols, qui sert de camp de base à ces essais, nous permettent de constater l’efficacité des 4 roues directrices qui équipent la voiture. La voiture braque vraiment bien malgré ses énormes jantes et pneus (21 pouces tout de même).
Durant ces essais, nous avons pu prendre le volant de la version “d’entrée de gamme” (environ 100 000eu tout de même) Quattro et la version RS (qui débute à 141 000 euros, 181 000 euros pour l’exemplaire de test).
Je vais donc vous raconter notre périple avec la RS pour ensuite cibler les différences avec la Quattro.
RS ou Quattro ?
Les deux partagent le même confort et silence à bord lorsqu’on souhaite se promener dans ces belles campagnes. Régulateur adaptatif, maintien dans la voie, on se demande même si on conduit encore à vrai dire.
Toujours est-il que le plaisir de l’électrique c’est aussi ça, rouler dans le silence, en totale détente. C’est toujours amusant de constater à quel point, ce type de propulsion détend au volant.
Nous sommes en mode confort et la voiture profite donc de son amortissement piloté à 3 chambres pour préserver nos fessiers. La suspension est d’ailleurs un modèle du genre. Le maintien de caisse est parfait et les percussions très limitées malgré les pneus ultra-fins des exemplaires de test.
Nous traversons de beaux villages, les gens se retournent sur la voiture. Son design n’y est pas pour rien. Certains doivent être déçu de nous voir passer en silence, sans le bruit d’un V8 qui glougloute comme sa cousine RS6. Même des agents de la maréchaussée nous ont arrêté pour en savoir plus sur cette Audi d’allure si sportive. Suite à son ordre de faire une accélération en partant, je pense néanmoins qu’il restera un peu triste de n’avoir entendu que le “wwwon-wwon” du moteur et le bruit des pneus qui arrachent le bitume.
Bon, le tourisme c’est bien, mais avec mon copilote du jour (il ne doit pas avoir l’habitude) Romain Monti (* pilote professionnel en GT3/4), nous n’avons jamais été au mont Ventoux et il nous fait face à cet instant. Ni une, ni deux on décide de quitter le roadbook de l’essai et d’aller vider notre batterie sur la montée de ce célèbre sommet.
Direction le Ventoux !
Nous avons dans nos mains une version RS de 600 ch (646 ch en overboost). La veille nous roulions la version Quattro de 476 ch (500 ch en overboost).
Et je dois dire que la différence de poussée est impressionnante. Dans la RS, mon crâne s’enfonce nettement plus dans l’appui tête à l’accélération. Petit rappel sur les performances, la Quattro est donnée pour 4,1s sur l’exercice du 0 à 100 km/h. La RS de son côté l’abat quant à elle en 3,3s. Et cette seconde de différence est considérable en ressenti.
J’ai d’ailleurs fini par être quelque peu nauséeux en passager de mon pilote du jour, qui souhaitait voir combien de temps il pouvait plaquer son téléphone sur sa poitrine à l’accélération… Sachez que cela dure facilement 4 à 5 secondes avant que la poussée ne se lisse.
Au delà de la blague, ce fut un exercice parfait pour illustrer en vidéo ce que nous ressentions à l’accélération.
La version RS est équipée d’un différentiel arrière piloté spécifique. Et encore une fois, cela change véritablement le comportement de la voiture dans les virages. Déjà particulièrement agile, il est désormais impossible de la prendre en défaut lors des enchainements. La puissance se répartit parfaitement et le différentiel arrière se verrouillant apporte même un semblant de survirage peu fréquent chez le constructeur d’Ingolstadt !
Le centre de gravité hyper bas de la voiture (merci les batteries dans le plancher) procure une tenue de route au delà de tout reproche. La voiture vire à plat, les suspensions ne pompent pas sur les bosses, c’est un sans faute.
Personnellement, je mettrais un bémol sur la direction qui forcément manque un peu de ressenti. On a mal à savoir ce que font vraiment les pneus. Mais c’est commun à beaucoup de modèles de cette catégorie. On reste dans des GT et non des ultra-sportives.
Le plus gros défaut pour les amateurs de voiture de sport que nous sommes reste sans surprise l’absence de bruit, de caractère mécanique. Le rythme, bien que très élevé, que la voiture peu soutenir, ne procure hélas que peu d’émotions…
Light is (still) right
L’autre défaut qui apparait après cette petite aventure au mont Ventoux, c’est le poids. Il faut dire qu’avec environ 2300 kg sur la balance, cette GT ne fait pas dans les poids plumes.
Et c’est en attrapant les freins après chaque mise en vitesse fulgurante que cela apparait. La voiture accélère tellement fort qu’on oublie son poids, mais il faut tout de même le garder à l’esprit à l’approche d’une épingle.
Notre exemplaire ne disposait pas des freins céramiques optionnels, mais du nouveau système avec les disques recouvert d’une pellicule de carbure de tungstène. Rassurez-vous il reste malgré tout, très efficace !
Sachez qu’en autonomie sur l’essai, que ce soit avec la Quattro ou la RS, nous avons tourné à 400km environ avec une conso moyenne de 28,7 kWh/100km (en allant au mont Ventoux). Pour le retour à la gare aux allures légales et en roulant tranquillement, j’ai réussi à atteindre une conso de 18 kWh/100km, trajet routier et urbain de 70km. Pour rappel, la batterie fait 93kW (86kW utiles) sur les 2 versions (lire ici).
Restons branchés
La journée touche à sa fin et il va être temps de ramener ce bolide tout noir à sa base. Oui cette configuration quasi entièrement noire fait un peu vaisseau furtif je trouve.
En bilan, il est difficile de reprocher des choses à cette voiture tant le niveau de performances, de confort et de finitions sont élevés.
Pour moi comme pour certains d’entre vous je pense, le principal défaut restera que ces performances s’exécutent froidement, sans créer la moindre chair de poule. Et c’est un peu dommage, car la tenue de route procurée par le centre de gravité hyper bas ainsi que les 4 roues directrices sont sidérantes. Il va falloir s’y habituer.
Enfin, cette voiture reste un fleuron de la gamme Audi et les chiffres de vente pour la France sont très raisonnables (300 exemplaires de prévus pour 2021). Mais sachez que si vous disposer du budget et que vous n’habitez pas loin d’une borne Ionity, la comparaison avec sa sœur Porsche Taycan (lire notre essai) se tient et il serait dommage de ne pas aller essayer l’Audi.
En attendant, je vais aller écouter des vidéos de l’Audi R8 V10 pour me remémorer le bon vieux temps….
Un grand merci à Audi France pour l’invitation dans cette période compliquée pour offrir de beaux cadres aux essais.