Un SUV ? Même pas surmotorisé ? En essai chez AutomotivPress ? Rassurez-vous, ce n’est pas un changement drastique de ligne éditoriale, juste un écart (justifié mais chut, c’est la surprise) pour pouvoir revenir ultérieurement à nos premiers amours : les sportives.
Tant qu’à faire un essai, autant le faire bien. Même s’il serait vain de juger ce Nissan Juke selon nos critères habituels. D’un autre côté, selon quels critères juger l’auto si ce n’est la capacité à nous incruster dans le siège ou à s’accrocher dans les virages ?
Tout d’abord, un peu de remise en contexte. Nous sommes en 2021 et, au-delà d’une pandémie qui nous empoisonne depuis plus d’un an maintenant, une maladie dénommée autophobie se répand chaque jour un peu plus. A coups de règlementations de plus en plus contraignantes, la voiture devient au mieux un outil, au pire une arme de destruction massive, directe ou indirecte, qui menace la planète et les humains.
Face à une politique de plus en plus contraignante, les constructeurs sont forcés de revoir leur gamme : un maximum de voitures non polluantes pour, dans le meilleur des cas, quelques modèles axés sur la performance.
Résultat, dans les gammes moyennes, nous aurons de moins en moins de choix. Si l’électrique gagne du terrain (justifié ou non, c’est un autre débat), il y a toujours un besoin de voitures familiales multi-usage permettant d’enchaîner les kilomètres en toute facilité. Comprenez sans faire de pauses de 4 heures pour recharger les batteries.
Sur ce segment, afin de répondre aux exigences règlementaires, le standard va devenir le véhicule de taille moyenne, à motorisation moyenne (entre 100 et 120ch), aux capacités dynamiques et aux performances moyennes. Les éléments différenciants devenant alors le style et l’équipement.
C’est dans cette optique que je vous propose de faire le point sur ce Nissan Juke Enigma.
Un style dans l’air du temps
Je n’aime pas les SUV. C’est un fait. Cependant c’est, depuis plus de dix ans maintenant, le type de carrosserie qui fait fureur. Je n’aime pas ça, mais j’arrive à comprendre que cela plaise. En effet, plutôt qu’une berline au style convenu, le look baroudeur, prêt à prendre les chemins de traverses pour des aventures périlleuses donne un peu de piquant à la vie. En me replongeant dans mes souvenirs d’enfance, la Talbot Matra Rancho paternelle évoquait les transports de troupe quand nous rentrions avec les copains de l’école dans le coffre.
Et ce côté baroudeur, le Juke sait le cultiver. Une proue moderne et lumineuse, un capot bombé comme s’il renfermait un gros V8 et une ligne de toit fuyante façon coupé. Les ingrédients du petit SUV dynamique sont bien présents dans les traits de la voiture.
Dans cette version spéciale Enigma, la teinte bicolore gris Squale et noire (pour le toit) ainsi que les jantes de 19 pouces lui donnent un air sportif…Qui conviendrait assez bien à une version Nismo RS (lire notre essai du précédent Juke en version Nismo).
Equipement technologique soigné
A l’intérieur, le noir prédomine. Siège, tableau de bord, les touches de couleur sont rares mais c’est dans l’esprit de la teinte carrosserie. Si le design reste assez classique, un gros effort a semble-t-il été fait sur l’équipement info-divertissement. Une connectivité qui fait partie désormais des éléments distinctifs dans l’achat d’un véhicule. Ainsi le Juke Enigma est-il compatible avec Amazon Alexa et Amazon Echo, permettant d’activer vocalement 13 fonctions telles que l’allumage des feux, indiquer l’emplacement de stationnement, connaitre l’autonomie en carburant ou de vérifier le verrouillage des portes. Autant l’avouer, je dois être trop vieux pour ces choses-là.
Après des dizaines d’essais, je suis devenu assez sensible à l’ergonomie des systèmes embarqués. Lorsque l’on n’a que quelques jours pour se faire une idée d’un véhicule, il est agaçant de passer des heures à comprendre l’agencement de fonctionnalités basiques et (véritablement ?) utiles comme le régulateur de vitesse ou la désactivation de l’ESP (si, si, c’est utile d’habitude dans les sportives). Je dois avouer que l’agencement des commandes (réelles sur le volant, virtuelles sur les écrans embarqués) est très réussi. La navigation se fait simplement et les activations sont simples. Bravo pour ce point.
Family car un peu juste
Côté confort, le Juke fait bien le travail aussi. Les sièges sont confortables, l’amortissement suffisamment souple pour absorber les irrégularités de la route sans pour autant être complément mou.
A l’arrière, la place est raisonnable, mais si le conducteur et même le passager avant sont plutôt bien traités au niveau des rangements, c’est moins le cas à l’arrière. Les bacs de portières sont relativement petits et malheureusement les sièges ne sont pas équipés d’une pochette dans laquelle votre ado pourra ranger sa tablette. De même, une seule prise USB est disponible. Attention aux guerres pour recharger deux téléphones.
Côté coffre cependant, un bel effort a été fait. Si la première version du Juke était décevante sur ce point, cette nouvelle mouture se montre plus en phase avec sa taille globale : avec 422 litres, les vacances en famille sont envisageables.
Et côté conduite ?
Assez fait le tour de la bête, passons désormais derrière le volant.
Comme je m’y attendais, le Juke est plutôt tranquille. La boite automatique DCT7 se montre un peu brutale à froid au moment de démarrer, mais tout rentre vite dans l’ordre et côté mécanique, le mot d’ordre est « cool ». Cool dans les sensations, cool dans les passages de vitesses et dans les accélérations : “Daddy cool” comme le chantait Boney M 😉 Malgré tout, les 117ch ne rechignent pas à la tâche et assurent des reprises acceptables.
Le châssis de son côté n’est pas aussi mauvais que l’on pourrait le craindre. Bien sûr il ne faut pas en attendre des miracles, mais une attaque dynamique de courbe ne se soldera pas forcément par un sous-virage de cochon et, en cas de lever de pied dans un virage, la poupe s’allège quelque peu, donnant une sensation de dynamisme plutôt bienvenue.
Soyons clairs, le Juke Enigma n’a rien de sportif : ni la tenue de route, ni les performances. Mais il est sain et équilibré et le provoquer n’entraine ni sueurs froides, ni arbre de Noël au tableau de bord avec l’activation de toutes les aides à la conduite. Bref une base saine pour un prochain Nismo RS ?
En conclusion, si les voitures du future proche sont condamnées à être uniquement des outils pour aller d’un point A à un point B sans provoquer de frissons, la Nissan Juke Enigma est une proposition qui trouvera son public. Le style est bien ciblé pour l’époque, les équipements sont conformes aux attentes du plus grand nombre et elle ne s’avère pas désagréable à conduire en usage utilitaire. Si cela permet à Nissan de faire assez de volume pour proposer des modèles plus passionnants comme la GTR ou la Z (s’il vous plait, ramenez-là en Europe !!!), pourquoi pas.