Ah Ferrari, le mythe, la légende ou même le fantasme pour certains. Le cliché de la voiture de sport rouge, dans le bon sens du terme, et une icône de l’Italie loin devant la Pizza ou la Mozza. Alors vous pensez bien que quand l’occasion de se mettre derrière le volant d’une berlinette arborant fièrement le cheval cabré s’est présentée, il ne m’a pas fallu bien longtemps avant de sauter sur l’occasion !
La berlinette en question est une Ferrari 488 GTB (lire ici) de 2019, affichant des lignes affutées qui pourrait tout à fait la faire passer pour la petite dernière de Maranello. Elle a pourtant été présenté en 2015, preuve que son design a bien traversé les années, sans doute aidée par le fait que la F8 Tributo (lire ici), sa remplaçante en 2019, lui ressemble pas mal. Je fais le malin avec la gamme Ferrari, mais j’avoue qu’après la 355 de mon adolescence, j’ai eu un peu de mal à suivre. Sans doute déçu par la 360 qui lui a succédé, quelque chose s’est brisé dans mon cœur de tifosi et la 355 reste tout en haut de mes préférences pour les Ferrari moderne, enfin disons plutôt récentes puisque vous aurez compris que mon adolescence date de la fin du siècle dernier… Si on remonte à l’origine de la lignée des petites Ferrari à moteur central, dont la 488 est la digne héritière, tout à commencé par celle qui n’a pas osé s’appeler Ferrari, la Dino 206 puis 246 GT de la fin des 60s. La recette de la petite Ferrari pour faire concurrence à la 911 n’a fait ensuite que s’affiner, en conservant une fiche technique assez proche : petit moteur en position centrale arrière, d’abord un V6 puis un V8 à partir de la 308 et suivantes (328, 348, 355, 360, 430, 458). La Ferrari 488 GTB est celle par laquelle le changement est arrivé, un peu à l’image de la 996 chez Porsche (lire notre essai ici) qui a fait basculer le vénérable Flat 6 du coté du refroidissement à eau, la 488 est celle qui a apporté les Turbo sur le V8 ! Contrairement à l’allemande elle garde l’avantage d’un physique qui l’aide, mais pour certain cette concession aux émissions résonne comme une véritable trahison.
Ferrari 488 GTB, des lignes tranchées pour l’aéro
Prenons donc le temps de détailler les lignes de la belle italienne puisqu’on parle de son physique. Ce qui attire le regard en premier sont ces flancs échancrés laissant apparaitre de chaque côté une large prise d’air qui viennent gaver en air frais le V8. Joliment intégrées elles renforcent un arrière massif qui reste élégant et se termine sur une face arrière cerclée de 2 feux ronds typiques Ferrari. En y regardant de plus près, on se rend compte de nombreux détails aéro : l’extracteur très travaillé en partie basse intègre un feux de brouillard qui ressemble fort à un feu de pluie de compétition, tandis qu’au centre des 2 feux les calories s’extraient du V8 par d’élégantes « ouvertures » grisées. Les sorties d’échappement de chaque côté se rapproche du centre de la voiture pour laisser là aussi de la place à l’évacuation du flux d’air réchauffé par son passage dans la salle des machines.
Les flancs ne sont pas en reste, comme on le disait les larges prises d’air y sont bien intégrés dans une forme de goutte d’eau (ou plutôt un calisson qui serait resté trop longtemps au soleil), la poignée de porte aidant même à guider un peu plus d’air au bon endroit, lui-même ensuite répartie une fois capturé. La partie basse de la porte est soulignée par un bas de caisse marqué, cette fois-ci sans doute plus utile pour donner de l’appui … et du look. Le profil de la berlinette ne trompe pas sur la marchandise, une ligne reconnaissable et associée à une Ferrari assez facilement, des passages de roues marqués et bien remplis par les roues en 20’’ (305 de large derrière !) et une ligne de toit soufflée laissant la place à un habitacle pour 2.
La partie la plus surprenante de l’auto est pour moi la face avant. Les longs phares étirés cherchent à ressembler à ceux de LaFerrari (lire ici) – il y a pire comme référence – tandis que la bouche tire clairement du côté des Lambo’. Certainement à cause de la lame avant qui remonte sur les côtés à la façon d’une Huracan. Cette lame n’est là que pour la déco puisqu’elle guide l’air vers les entrailles de la voiture et sert aussi à plaquer le train avant au sol, y compris à des vitesses que nous ne pouvons atteindre sur route. Une partie de cet air ressort juste au dessus, sur le capot lui donnant cette belle double vague, qui sera encore agrandie pour n’en former plus qu’une sur la déclinaison Pista (lire ici).
Un intérieur sobre et efficace
Assez parlé du look, et si on ouvrait la porte ? Un premier regard pourrait le trouver un peu sombre ou triste, sans doute que dans la palette de combinaisons et d’options on peut faire d’autres choix, mais il a l’avantage d’être sobre et efficace. Sobre puisque seules quelques surpiqures rouges viennent souligner les lignes des sièges et du tableau de bord tandis que des touches de carbone rappellent la vocation première de la voiture, la performance ! L’installation à bord est plutôt facile, le réglage du siège est simple puisqu’il s’avance et … c’est tout ! C’est ensuite au volant de s’ajuster à la morphologie de chacun pour trouver « sa » position. Assis assez bas, les jambes plutôt tendues mais soutenues assez loin sous les cuisses, on se sent plutôt bien avant même d’avoir fait 1 mètre en roulant. Sans doute que les gabarits un peu plus petit (je fais 1m75) pourrait se trouver un peu trop bas pour bien voir l’avant de la voiture, mais pour moi c’est juste bien. Le tableau de bord est lui aussi sobre. Point d’écran géant au centre, de multiples boutons partout, simple et efficace !
Il ne manque pas quelque chose tout de même au milieu des 2 sièges ? Oui la belle grille Ferrari chromée qui claque à chaque passage de rapport laisse ici sa place à la modernité d’une boite séquentielle robotisée. Ce sont donc des boutons qui lui volent la vedette, complétés par 2 belles palettes fixes derrière le volant. Celle de droite permet de les monter, celle de gauche de rétrograder. L’éternel débat entre les palettes fixes et celle qui tournent avec le volant tourne court ici dès que l’on évoque le sujet de la commande de clignotants … sur le centre du volant. Carrément plus déstabilisant que des palettes fixes, mais si c’est le seul défaut que l’on trouve à cet intérieur, on devrait pouvoir s’en accommoder, ou tout au moins s’y habituer ! Réglage des rétros qui donne une vision parfait les larges hanches de l’italienne, on est prêt pour la lancer la machine.
Moteur, ça tourne … action !
La clé de contact dans l’habitacle, une première pression sur le bouton Engine Start au volant réveille l’électronique et anime le bloc compteur. C’est seulement à la deuxième pression que le V8 3.9 litres s’exprime avec un généreux coup de gaz au démarrage. L’ambiance est donnée, le ton aussi, on peut presser la palette de droite pour enclencher la 1ère et décoller sur un filet de gaz. Les 1370 kg (à vide, probablement un poil plus avec tous les pleins faits … plus Alban et moi à bord) se meuvent avec une facilité déconcertante pour se faufiler dans les rues étroites. Etroites pas tant que ça d’habitude, mais là avec les 1m95 de large et l’arrière qui semble plus imposant que l’avant, la prudence est de mise avant de retrouver la route principale. Même en étant assis bas la vision est plutôt bonne, le galbes des ailes avant donne sans doute l’impression de prendre plus de place que réellement, plutôt bien pour éviter passer trop prêt des obstacles.
Difficile de passer inaperçu lors des ces premiers mètres, une Ferrari rouge dans le centre d’un petit village de la vallée d’Abondance, voilà qui n’est pas une scène très courante. Les coupables de l’histoire ? L’équipe du Circuit de Glace d’Abondance qui propose chaque hiver des stages de pilotage sur glace, vers qui nous avions essayé l’Alpine A110 il y a quelques temps (lire ici) est tombée sous le charme de la vallée et offre depuis cette été des baptêmes au volant ou en passager à bord la belle italienne. Voilà qui explique aussi sa déco Expert Pilot sur les flancs. Une fois sortis du centre la route se déroule doucement et c’est sur un filet de gaz toujours que je me cale aux 50 km/h réglementaires quand j’aperçois que la boite en mode auto enquille déjà le 7ème rapport ! Sans sentir le moindre passage de vitesse, elle cherche l’efficience et optimise au mieux en fonction de la demande du pied droit. C’est un des avantages de la suralimentation, le couple est disponible bien plus bas que sur un atmo qui demande à chanter pour s’exprimer. La fiche technique indique ainsi que les 760 Nm (oui oui 760 sans faute de frappe) sont dispo dès 3.000 tr/min, ça aide aussi pour les reprises douces en bas du compte tour…
Nous voila sortis du village et sur une belle départementale limitée à 80, je descend donc manuellement 4 rapports pour mettre la 3 à l’approche du virage, et une fois la vue et la route dégagées, j’écrase la pédale de droite franchement pour la première fois. Wahou quel choc !! En moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire l’aiguille du compte tour bien au centre vient chatouiller le gros 8, le premier chiffre rouge, m’indiquant qu’il est plus que temps de presser la palette de droite pour mettre la 4. La poussée est toujours aussi forte, je ne prends pas le temps de regarder le tachymètre car le virage si lointain il y a quelque secondes nous saute déjà au visage ! L’occasion parfaite de presser la seconde pédale qui à mon grand soulagement offre une réponse virile ralentissant la voiture à une vitesse nettement plus raisonnable. Oh quelle violence dans un laps de temps et de distance si court ! C’est absolument déconcertant d’immédiateté et d’efficacité. Un petit dépassement à faire, check en face et dans les rétros, cligno … ah au centre du volant, broap et le banal déplaçoir ralentisseur est effacé en une demi-seconde à peine. La fiche technique (encore !) parle de 3.0 sec pour le 0 à 100 km/h et 8.3 pour le 0 à 200 km/h. Des chiffres qui impressionnent, mais ce sont bien les reprises qui le sont encore plus au volant, les 670 chevaux sont bel et bien là, et instantanément.
Etre en plein cœur des montagnes et se contenter de quelques lignes droites ne seraient pas rendre hommage à la belle italienne, allons chercher les virages et direction le Col de Forclaz pour une route un peu plus dynamique. Le début est quelque peu bosselé, agréable surprise de ne pas se sentir complètement secoué mais plutôt fermement soutenu. Pas de rebond désagréable ou de train avant qui saute, la voiture absorbe sans broncher et les sièges, aussi fin soient-ils, préservent un bon niveau de confort. Nous voilà enfin, ou déjà je ne sais plus, au début de ce beau morceau fait d’épingles, de relances, de soleil couchant et de vue sur le Léman.
Alors pour la vue on attendra d’être en haut, mais la montée on va la savourer ! La première épingle arrive déjà, frein toujours aussi mordant, on descend les rapports de la main gauche, braquage sans effort mais avec une précision sans faille, roues droites et hop on remet gros gaz. La montée en régime est légèrement ralentie par l’électronique qui ne trouve pas tout le grip nécessaire à faire passer immédiatement la puissance, mais à peine le temps de le remarquer que le compte-tour (et le tachymètre) s’enflamme. Plap de la main droite et c’est la 3ème qui pousse tout aussi fort, re frein, re palette de gauche, re braquage chirurgical facile, re gaz, re main droite, et ainsi de suite avant d’arriver en haut avec une banane énorme au travers du visage.
Sur les 2 dernières épingles j’ai vu Alban se contorsionner, pourtant il n’est pas du genre à chercher un sac à vomis, mais les freinages et accélérations répétés ont eu raison des flyers proprement rangés dans le vide poche, il essaye de contenir leur fuite… Après une pause paysage (et rangement de flyers) au pied de l’observatoire de Tréchauffé, on redescend plus calmement pour apprécier la facette GT de la Berlinetta qui sait se faire discrète et facile à souhait. Je ne me résous pas pour autant à mettre la boite en mode auto, l’utilisation des palettes est très agréable et le coup de gaz au rétrogradage plutôt flatteur pour l’oreille, nul besoin de chercher les commandes de la radio.
Le retour au point de départ se fera plus tranquillement, les quelques accélérations plus ou moins véloces en partant de régimes plus ou moins hauts donnent vraiment l’impression d’une force inépuisable du V8. On demande avec le pied droit, il répond ! Et tout de suite en plus !! La compagne parfaite pour des balades sages, ou pas, je n’aurais pas cru ça d’une Ferrari.
Alors, c’est bien comment une Ferrari 488 GTB ?
C’est bien, beaucoup ! Confort, facilité et efficacité pourraient être ses 3 meilleurs qualificatifs. Côté défaut, car il faut bien lui en trouver, il y a évidemment la commande des clignotants sur le volant. Alors oui l’absence de commodos derrière le volant c’est super beau, mais aller chercher le cligno de droite pour annoncer sa sortie du rond-point alors qu’on est encore braqué à gauche, c’est tout sauf naturel et pratique ! Il y a aussi la bande son, très agréable mais loin d’être envoutante comme sur un V8 atmo – au hasard celui d’une RS4 B7 (lire ici) – faute d’avoir déjà gouté à celui d’une 458. On sent que Ferrari y a apporter beaucoup d’attention, le son monte d’un cran autour de 3.200 tr/min via l’ouverture de valves, bien pour rester discret en bas du compte-tour, mais en haut ça reste castré par les turbos. On pouvait s’en douter, mais on aurait aimé un peu plus. Enfin dernier point lié lui aussi aux turbos qui justifient leur présence pour faire baisser les grammes de CO2, ils ne font cependant pas trop baisser la conso. Alors oui en roulant tout cool Alban me confirme qu’on doit pouvoir tourner autour des 12 litres/100 km, en balade sportive comme aujourd’hui on est très au dessus des 20 et sur circuit c’est carrément 60 obligeant un ravitaillement en cours de journée ! Certes on ne choisit pas une Ferrari pour la conso, disons que ça impose les pauses pour remplir le réservoir de 78 litres…
Au moment de repartir, les 60 ans qui séparent cette Ferrari 488 GTB de ma Sprite daily estival (lire ici) me sautent au visage, même si elle était elle aussi vendue comme une voiture de sport à son époque. Cela permet aussi de se rendre compte des progrès réalisés durant ces 6 décennies et du niveau d’aboutissement de la Ferrari. Rendre une machine aussi performante aussi accessible n’est pas une mince affaire, et là le pari est ultra réussi !
Un grand merci à Alban du Circuit Glace d’Abondance, si vous voulez découvrir les joies du cheval cabré, au volant ou en passager de cette Ferrari 488 GTB, c’est par ici qu’il faut regarder ici.
Crédit photos @ Ambroise Brosselin.